Le sabotage probable de deux gazoducs Nord Stream en provenance de Russie montre que l’infrastructure énergétique néerlandaise est également vulnérable, déclarent des experts à Lakoom Info. Mais on attend toujours une stratégie nationale pour protéger les pipelines et les câbles électriques.
Les Pays-Bas vont tirer de plus en plus d’énergie de la mer du Nord dans les années à venir. Cela nous rendra plus dépendants des infrastructures offshore et entraînera des risques.
« Nous devons commencer à prendre en compte le fait qu’il s’agit d’une vulnérabilité majeure », déclare l’expert en sécurité Kenneth Lasoen de l’Institut Clingendael. « Plus il est important pour notre approvisionnement énergétique, plus il devient intéressant pour un adversaire ou un ennemi de commencer à le cibler. »
Selon lui, l’attaque probable des pipelines Nord Stream est un « signal d’alarme pour l’ensemble de l’Europe ». « Cela montre la relative facilité avec laquelle cela peut être fait ».
Les pipelines norvégiens sont essentiels
C’est également ce que pense l’expert en énergie René Peters du TNO. Les pipelines Nord Stream touchés ont été mis hors service, mais une prochaine attaque pourrait viser les pipelines qui acheminent encore du gaz vers l’Europe.
« Si les pipelines norvégiens vers l’Allemagne sont sabotés, l’Europe du Nord-Ouest et l’Allemagne en particulier ont vraiment un énorme problème », a déclaré M. Peters. La pénurie d’essence qui se profile pourrait alors s’aggraver. Des dizaines de milliards de mètres cubes de gaz passent par ces gazoducs chaque année.
C’est pourquoi l’attaque contre les tuyaux du Nord Stream est un exemple fort de guerre psychologique, selon M. Lasoen. Il soupçonne la Russie d’être derrière le sabotage. « On peut considérer cela comme l’envoi d’un signal : la prochaine fois, ce sera une ligne active. La question est de savoir s’ils iront aussi loin. »
Des cibles lucratives pour le sabotage
Le groupe de réflexion HCSS, basé à La Haye, a évoqué la vulnérabilité de la mer du Nord l’année dernière dans un rapport sur la valeur économique de la région et les menaces potentielles.
Le nombre croissant de parcs éoliens en mer est une question clé de l’étude. Les plateformes associées qui envoient l’électricité vers la terre sont « des cibles lucratives pour le sabotage », conclut le groupe de réflexion. Quiconque peut les désactiver peut provoquer des pannes de courant prolongées et des dommages économiques importants.
D’ici 2030, au moins un tiers de notre électricité proviendra de parcs éoliens en mer, et ce pourcentage continuera à augmenter par la suite. Selon M. Lasoen, il n’est pas facile de saboter cet approvisionnement énergétique ; seuls certains pays disposent des navires, des sous-marins et des explosifs nécessaires.
Mais des milliers de kilomètres de pipelines et de câbles sont difficiles à défendre, même si les attaquants sont détectés. « Alors il faudra du temps pour y arriver. »
Loin au large
De plus en plus de parcs éoliens, de plateformes et de câbles sont construits loin des côtes, dans la zone économique exclusive (ZEE). Les Pays-Bas sont le seul pays autorisé à y extraire de l’énergie, mais pour le reste, il s’agit d’un territoire international. Il est donc plus difficile d’y sécuriser les infrastructures. Il s’agit d’un « dilemme crucial », selon le rapport du HCSS, mais il n’est pas souvent discuté.
Cela a également été révélé la semaine dernière dans une analyse des risques pour la sécurité nationale que le ministre Dilan Yesilgöz-Zegerius (Justice et Sécurité) a envoyée à la Chambre des représentants. Dans le chapitre sur les infrastructures vitales, la mer du Nord apparaît à peine.
Un court paragraphe indique seulement qu’il existe des « préoccupations » concernant la vulnérabilité des infrastructures énergétiques en mer du Nord. Mais selon l’analyse, l’importance de cette infrastructure « pour la sécurité de l’approvisionnement en électricité » n’est pas encore claire.
« C’est très prudent », répond M. Peters de la TNO. « Peut-être que ce n’est pas critique pour la fourniture d’électricité maintenant, mais ça le deviendra ». Par Suivez l’argent Le gestionnaire de réseau TenneT a confirmé au début de l’année que les pannes des parcs éoliens de la mer du Nord pourraient entraîner d’importantes coupures de courant aux Pays-Bas.
Stratégie retardée
La Chambre basse a adopté une motion à la fin de l’année dernière demandant au gouvernement d’élaborer une stratégie internationale pour la protection des infrastructures vitales en mer du Nord. Il n’y en a toujours pas. Il s’agit d’un « dossier complexe », a écrit la ministre Kajsa Ollongren (Défense) à la Chambre en juillet. Par conséquent, il faut plus de temps pour répondre à la motion.
Peters est heureux que l’on accorde plus d’attention à la sécurité en mer du Nord. « Le sujet est sur la carte. Avec les événements d’hier qui s’y ajoutent, elle est devenue totalement incontournable. C’est justifié. »