Alors que l’aviation commerciale se remet encore de la crise du corona, le nombre de vols privés atteint déjà des niveaux record cette année. Ceci alors que les jets privés ont un impact climatique beaucoup plus élevé par passager. Est-il temps d’interdire les jets de luxe ?
Un nombre impressionnant de 164 000 kilomètres parcourus par l’avion privé de Max Verstappen déjà cette année. Le Dassault Falcon 900EX du pilote de Formule 1 a pris l’air 97 fois, émettant autant de CO2 qu’une voiture faisant 130 fois le tour du monde.
Pour Greenpeace, cela montre comment une petite élite aggrave le changement climatique par son comportement polluant. « Bien qu’il s’agisse d’un luxe inutile dans presque tous les cas », déclare Dewi Zloch, de l’organisation environnementale. « Ces émissions sont très faciles à prévenir. Nous préconisons donc l’interdiction des vols privés. »
Cette année, les émissions des vols privés semblent en fait augmenter à nouveau de manière substantielle, selon un rapport du CE Delft commandé par Greenpeace. Cette année, le nombre de vols privés à l’aéroport de Schiphol et de Rotterdam La Haye était déjà plus élevé que sur l’ensemble de l’année 2019. L’utilisation de jets privés est également en hausse dans d’autres régions d’Europe, comme l’ont montré des recherches antérieures de Transport & Environment.
Les vols privés ne représentent qu’une petite partie de l’impact total de l’aviation sur le climat. Dans les aéroports néerlandais, ils représentent environ 0,5 % des émissions. Mais par passager, les émissions dans un avion privé sont 5 à 7 fois plus élevées que dans un vol commercial, a calculé CE Delft.
Les jets privés empruntent souvent des itinéraires où des vols réguliers sont également disponibles – ou des trains à grande vitesse. Il est grand temps que les gens soient obligés d’utiliser ces options, estime Zloch. « Le gouvernement devrait interdire des choses dont nous n’avons pas besoin mais qui sont très polluantes ».
Un comportement qui n’est plus acceptable
La France tente de faire inscrire la question à l’ordre du jour de Bruxelles. Le ministre des transports, Clément Beaune, pense que l’ensemble de l’UE devrait limiter les jets privés. « Certains comportements ne sont plus acceptables », a-t-il déclaré à l’AFP. Le Parisienaprès que l’on ait fait du bruit à propos des vols somptueux des riches Français.
Le ministre des infrastructures et de la gestion de l’eau, Mark Harbers, ne voit rien dans des règles plus strictes ou une interdiction. « Rendre moins attrayants des groupes spécifiques de trafic aérien, comme les vols privés, ne fait pas partie de la démarche visant à rendre l’aviation plus durable », a-t-il récemment écrit à la Chambre des représentants.
Le cabinet continue d’utiliser ses propres avions gouvernementaux pour voyager dans le monde entier, même lorsque des vols réguliers sont disponibles. Cette année, les avions du gouvernement ont déjà parcouru 172 000 kilomètres. Régulièrement, l’avion vole aussi à vide, a découvert RTL Newsparce que les ministres doivent être servis dans différents endroits. « Soyez heureux que nous soyons présents dans ce monde », a répondu le Premier ministre Mark Rutte.
L’avion du gouvernement néerlandais a déjà parcouru plus de 172 000 kilomètres cette année.
Durabilité ou taxe supplémentaire ?
Une interdiction n’est pas le seul moyen de réduire l’impact climatique des vols privés. Une taxe supplémentaire est également envisageable. La Suisse a déjà proposé de percevoir une taxe comprise entre 500 et 3 000 euros par vol privé. Faisant partie d’un ensemble plus large de mesures climatiques, ce plan a été rejeté par référendum en 2021.
Une telle taxe pourrait rapporter des centaines de millions d’euros par an dans toute l’UE. Cet argent serait utile pour développer une technologie d’aviation durable, estime le groupe environnemental Transport & Environment, basé à Bruxelles.
Les gouvernements devraient être les premiers à obliger les jets privés à devenir plus durables, estime l’organisation. Les petits avions peuvent être plus facilement électrifiés ou remplis de carburant renouvelable. En outre, les passagers fortunés des jets privés sont moins sensibles aux coûts supplémentaires qu’ils impliquent.
Le gouvernement doit montrer l’exemple
Il y a quelque chose là-dedans, dit Paul Peeters, chargé de cours en tourisme durable à l’université des sciences appliquées de Breda. « Vous contribuez ensuite à amorcer cette transition vers des carburants durables ». Mais, prévient-il, « elle a également un haut degré de écoblanchiment. » En effet, ce même carburant renouvelable aurait pu être mis dans le réservoir d’un avion commercial, où davantage de passagers en auraient bénéficié.
Il comprend donc les appels à décourager les vols privés et pense que le gouvernement pourrait montrer l’exemple. « L’idée est peut-être que le gouvernement devrait également utiliser ses avions 50 % de moins d’ici 2030 qu’aujourd’hui, tout comme tout le monde devrait réduire ses émissions de 50 % », explique M. Peeters.
Selon M. Harbers, le gouvernement travaille à l’élaboration d’une directive générale sur l’utilisation de son propre avion privé. Cela devrait « commencer à prendre forme dans les mois à venir ».